On the 20th of March 2018, French and Luxembourgish authorities signed a new double-tax treaty (DTT) which would replace the old agreement, in force since nearly 60 years. The new treaty, which could enter into force as early as on the 1st of January 2019 (under the condition that it’s approved by both parliaments before the end of the year), introduces several important changes, namely to the definition of the tax residence and the treatment of withholding tax on certain revenues. These changes may have a significant impact on concerned cross-border investments.

Read the full details in French below.

 

Flash Actu :
Nouvelle Convention Fiscale France – Luxembourg

Le 20 mars 2018, la France a accueilli une importante délégation officielle venue de Luxembourg. Parmi les accords signés à cette occasion, la nouvelle convention fiscale franco-luxembourgeoise présente un intérêt particulier. La convention bilatérale actuelle, en vigueur depuis presque 60 ans, avait été ajustée par avenant à quatre reprises, notamment afin de corriger certaines dispositions permettant de bénéficier d’une double exonération d’impôt. Cette fois-ci, nous assistons à une refonte complète du texte. Certaines modifications, qui suscitent dès à présent des réactions de part et d’autre de la frontière, auraient un effet non-négligeable sur les investisseurs.

Nous partageons avec vous quelques commentaires « à chaud » concernant les aspects les plus importants de ce traité qui pourrait entrer en vigueur au 1er janvier 2019 s’il est approuvé par les deux parlements avant la fin de l’année.
 

Assujettissement à l’impôt, condition sine qua non

En ce qui concerne les personnes physiques, les critères permettant de déterminer l’Etat de résidence fiscale ont été mis à jour selon le modèle OCDE (successivement : foyer d’habitation permanent, centre des intérêts vitaux, lieu de séjour habituel, nationalité). Pour rappel, l’ancienne convention prévoyait que le domicile fiscal des personnes physiques était au lieu de leur résidence normale entendue dans le sens de foyer permanent d’habitation, ou, à défaut, au lieu de séjour principal.

S’agissant des personnes morales, le domicile fiscal se trouve dans l’Etat où est situé le siège de direction effective.

En outre, pour bénéficier des dispositions de la convention, le contribuable devra être effectivement assujetti à l’impôt dans son pays de résidence. Certaines personnes morales, exonérées d’impôt, pourraient dès lors être exclues du champ d’application de la convention.


Retenue à la source sur les dividendes : augmentation du taux pour certains investissements immobiliers et aménagement des conditions du régime mère-fille

Le texte de 1958, ne faisant pas de distinction entre les catégories de sociétés distributrices de dividendes, prévoyait un taux de retenue à la source réduit à 5 % en cas de détention de plus de 25 % de capital et un taux de 15 % dans les autres cas. Ce régime était très favorable à certains investissements immobiliers, tels que les OPCI français (constitués sous forme de SPPICAV), lorsqu’ils étaient détenus à hauteur de plus de 25 % par un bénéficiaire résident luxembourgeois.

La nouvelle mouture prévoit une exonération totale de retenue à la source lorsque le bénéficiaire de la distribution est une société qui détient directement au moins 5 % du capital de la société qui paie les dividendes pendant une période d’au moins 365 jours. Si ces conditions de détention ne sont pas satisfaites, le taux de retenue applicable est de 15 %.

Un régime spécifique est par ailleurs prévu pour les investissements immobiliers : lorsqu’un véhicule dont les revenus sont tirés de biens immobiliers et qui distribue la majeure partie de ses revenus – typiquement les OPCI et les foncières cotées / SIIC – est détenu à hauteur de plus de 10 % par le bénéficiaire effectif des distributions, le taux de retenue à la source est celui prévu par la législation interne. A défaut de détenir plus de 10 % du capital, le taux conventionnel de 15 % est applicable. Pour rappel, le taux de la retenue à la source en droit interne français est actuellement de 30 % et il devrait être progressivement réduit à 25 % à horizon 2022.
 

Retenue à la source sur les intérêts : exonération totale et imposition uniquement dans l’Etat de résidence

Dans l’ancienne convention, il était précisé que les intérêts étaient imposables dans le pays de résidence, le pays de la source conservant la possibilité d’appliquer une retenue de 10 % maximum. Sur le plan pratique, étant donné que la France ne prévoit pas de retenue à la source sur les intérêts dans son droit interne, les intérêts d’obligations perçus par un résident luxembourgeois étaient uniquement imposés au Luxembourg.

La nouvelle rédaction supprime toute possibilité de retenue à la source et confirme l’imposition des intérêts uniquement dans l’Etat de résidence. Cette modification pourrait présenter un intérêt pour les résidents luxembourgeois détenant des contrats d’assurance vie souscrits auprès de compagnies françaises. En effet, les gains réalisés à l’occasion d’un rachat étant considérés comme des intérêts du point de vue conventionnel, il serait dès lors possible de réaliser un rachat en exonération d’impôt en France (au lieu d’une retenue à la source pouvant être réduite à 10 % grâce à la convention).  


Imposition des plus-values de cession

En matière de plus-values de cession, le caractère « à prépondérance immobilière » des sociétés peut désormais s’apprécier à tout moment au cours des 365 jours précédant l’aliénation.

D’autre part, une clause concernant les cessions de participations substantielles a été intégrée dans le nouveau texte. Sont considérées comme des participations substantielles les participations dans lesquelles le cédant, seul ou avec des personnes liées, détient directement et indirectement plus de 25 % des droits dans les bénéfices. Lorsque ces conditions sont réunies, le gain réalisé à l’occasion d’une cession de participation substantielle peut être imposé dans l’Etat de résidence de la société. A noter que cette disposition ne s’applique que lorsque le cédant a été résident de l’Etat de résidence de la société à un moment quelconque au cours des cinq années précédant la cession.
 

Impôt sur la fortune

Dans son article 21 relatif à l’impôt sur la fortune (qui s’applique donc à l’Impôt sur la Fortune Immobilière ou l’IFI), la nouvelle convention dispose que les biens immobiliers sont imposables dans l’Etat où ils sont situés. Ne faisant pas expressément référence à des sociétés à prépondérance immobilière, la rédaction de cet article semble suggérer que les biens immobiliers détenus indirectement par les résidents luxembourgeois ne seraient pas soumis à l’IFI en France.
 

Dispositifs anti-abus

Les autorités françaises et luxembourgeoises ont vraisemblablement accordé une importance particulière à l’élimination de toute possibilité d’évasion fiscale dans le cadre de la signature de la nouvelle convention. En particulier, le préambule précise que l’un des objectifs de la convention est l’exclusion des situations de non-imposition et de l’utilisation des mécanismes de « chalandage fiscal ».

L’article 28 de la nouvelle convention précise d’ailleurs que l’octroi des avantages de la convention serait refusé en présence d’un schéma dont le bénéfice de ces avantages était l’un des objectifs principaux.  Le protocole additionnel indique en outre que les dispositions de la convention n’empêchent pas la France d’appliquer tout son arsenal des dispositifs anti-abus (tels que les articles 123 bis ou 238 A du CGI) ou de toutes autres dispositions analogues.

L’administration fiscale française pourrait ainsi s’appuyer sur la rédaction très large de la convention lors des tentatives de remise en cause des montages qu’elle considérerait comme « abusifs ».
 

Conclusion

La refonte de la convention fiscale franco-luxembourgeoise est conforme à la volonté de l’administration fiscale de réserver à la France l’imposition des revenus de source française. Le Luxembourg étant une plateforme majeure pour les fonds d’investissement – notamment immobiliers – à l’échelle européenne, il convient d’ores et déjà de tenir compte de nouvelles dispositions lors de la structuration des projets. Compte tenu de l’introduction de la notion du seuil de détention pour déterminer le taux de la retenue à la source, les véhicules immobiliers dédiés à un cercle restreint d’investisseurs sont particulièrement impactés.

Enfin, le nombre d’allusions à la lutte contre l’évasion et la fraude fiscale fait écho aux récentes initiatives des députés de l’Union européenne en matière de déclaration obligatoire par les intermédiaires de montages fiscaux transfrontaliers présentant un risque de délit fiscal ou de blanchiment ou encore à la volonté de mettre en place une taxation équitable de l’économie numérique, bien présente au Grand-Duché.



Écrit par Denis Kouznetsov
Wealth Planner - Wealth Structuring Solutions
Lombard International Assurance