Ecrit par Axel Hoerger, CEO, Lombard International Assurance

L'article a été initialement publié dans le Paperjam


Beaucoup de personnes fortunées éprouvent un grand sentiment de responsabilité vis-à-vis de la société dans laquelle elles vivent, de l’écosystème financier mondial au sens large et de l’héritage qu’elles souhaitent laisser derrière elles.

Leurs décisions d’investissement reflètent de plus en plus une volonté d’obtenir non seulement des rendements financiers, mais également de contribuer à une meilleure société. D’où la popularité croissante de l’impact investing, ou investissement à impact social. Chez BNP Paribas Wealth Management, par exemple, les actifs de clients consacrés à ce type d’investissements ont été multipliés par dix au cours des six dernières années pour atteindre 10 milliards d’euros (12,3 milliards de dollars), selon un article publié cette année sur le site Professional Wealth Management

«Les arguments en faveur de l’impact investing sont évidents. Tout d’abord, les investisseurs vivent dans des sociétés qui sont façonnées par leurs propres investissements. Il est donc dans leur intérêt d’investir de manière écologique et socialement responsable. Ensuite, les économies ne peuvent naturellement prospérer sur le long terme que si la société au sens large se porte bien.»

Et dans un monde fortement globalisé, de plus en plus de gens sont sensibles aux enjeux sociétaux et environnementaux majeurs tels que l’inégalité des revenus et le changement climatique. Des objectifs clairs ont été fixés afin de répondre à ces défis, mais des investissements considérables doivent pour cela être effectués. L’Organisation des Nations Unies estime, par exemple, qu’il faudra entre 50 000 et 70 000 milliards de dollars pour réaliser ses Objectifs de développement durable, alors que les investissements nécessaires pour atteindre les objectifs fixés en 2016 dans l’Accord de Paris sur le climat sont évalués à plus de 12 000 milliards de dollars sur 25 ans. 

Les évolutions démographiques parmi les familles, institutions et personnes très fortunées (Ultra and High Net Worth - UHNW) alimentent l’espoir que ces objectifs sociaux et environnementaux mondiaux pourront être atteints. Selon des études menées l’année passée par UBS et OppenheimerFunds en collaboration avec Campden Wealth, environ 70 % des millennialsUHNW, 88% des femmes UHNW et 40% des family offices entendent prendre des décisions d’investissement qui sont en accord avec leurs valeurs sociales.  

Les investissements durables et alternatifs prennent aujourd’hui une part beaucoup plus importante au sein de portefeuilles plus larges, après avoir été souvent utilisés que comme des stratégies de niche. Certaines sociétés de gestion se concentrent désormais exclusivement sur les investissements durables. C’est notamment le cas de Generation Investment Management, qui promeut le «capitalisme durable». Créée il y a 14 ans, la société dispose aujourd’hui de plus de 18,5 milliards d’actifs sous gestion et gère l’un des fonds d’actions les plus performants au monde parmi tous les indices boursiers mondiaux existants, et pas uniquement ceux axés sur le développement durable.  

La demande croissante pour des solutions d’investissement à impact social a également poussé les grands noms du secteur des services financiers à prendre des initiatives. UBS travaille ainsi avec des partenaires extérieurs à l’industrie, tels que la Banque mondiale et le Forum économique mondial, au développement d’une plateforme d’architecture ouverte visant à faciliter les investissements durables. L’année passée, Credit Suisse a mis en place un «Impact Advisory and Finance Department» pour gérer ses activités dans le domaine. Par ailleurs, des leaders de l’industrie tels que KKR, Bain et Goldman Sachs font partie de ces institutions financières toujours plus nombreuses qui lèvent des capitaux en faveur d’investissements à impact social répondant à des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG).

Ces initiatives sont mises en exergue et encouragées par le travail de régulateurs et d’activistes dans le monde entier. La Commission européenne a ainsi décidé de définir plus clairement l’obligation légale pour les investisseurs et les gestionnaires d’actifs institutionnels de tenir compte des risques de durabilité dans leurs décisions d’investissement. Les régulateurs brésiliens sont, pour leur part, en train de réviser une résolution régissant les pratiques et informations à fournir en matière d’investissement pour les plans de pension fermés en vue d’une meilleure intégration des critères ESG. Et, l’été dernier en Australie, des actionnaires ont déposé une plainte contre la Commonwealth Bank of Australia pour insuffisance d’informations sur les risques liés au changement climatique, forçant ainsi la banque à changer son fusil d’épaule. 

Disposer d’une vision holistique des activités offre des avantages pour les entreprises et les investisseurs.

«Une étude menée par le Global Impact Investing Network et plusieurs cabinets de conseil, tels que McKinsey, indique que les investisseurs évaluent leurs rendements annuels entre 5% et 15%.»

Dans l’environnement volatil actuel, l’impact investing peut offrir aux investisseurs à la recherche de plus de stabilité, la possibilité de diversifier leurs portefeuilles et d’améliorer leurs rendements sur le long terme, tout en contribuant à un meilleur environnement et à une meilleure société. L’intérêt pour ce type d’investissement va continuer de croître, les investisseurs étant de plus en plus à la recherche de solutions qui permettent une gestion plus efficace de leur patrimoine et de leur succession tout en tenant compte des situations familiales, de la présence géographique et des styles de vie.